
Le numérique pourrait bien être notre allié contre le vieillissement du cerveau. Une vaste étude vient démontrer qu’un usage actif et régulier de ces outils réduit significativement le risque de déclin cognitif.
Le plus souvent pointées du doigt pour leur prétendue nocivité sur nos capacités cognitives, les technologies numériques pourraient bien, à en croire une récente étude, jouer un rôle protecteur face au déclin cognitif lié à l’âge. Une méta-analyse publiée en avril 2025 dans la revue Nature Human Behaviour vient bousculer les idées reçues et redonner ses lettres de noblesse à l’usage des outils numériques tels que les smartphones et les ordinateurs chez les seniors.
Menée par des chercheurs de l’université Baylor (Waco) et de l’université du Texas à Austin, cette méta-analyse a compilé les données de 57 études, regroupant plus de 411 000 adultes âgés de 50 ans et plus. Michael Scullin, professeur associé de psychologie et de neurosciences à Baylor, a déclaré : « Vous pouvez regarder les informations n’importe quel jour et vous verrez des gens parler des effets néfastes des technologies sur nous. On parle souvent de “pourrissement cérébral”, et la “démence numérique” est désormais une expression émergente. En tant que chercheurs, nous voulions savoir si c’était vrai. »
Une étude d’envergure aux résultats éloquents
Les résultats sont sans appel : l’utilisation régulière des technologies numériques est associée à une réduction de 58 % du risque de déclin cognitif. Et cette association reste significative même après ajustement pour des variables telles que le niveau d’éducation, le statut socio-économique ou encore l’état de santé général.

Au sujet des technologies numériques, « L’une des premières choses que les personnes âgées nous disent, c’est : “Je suis tellement frustré par cet ordinateur. C’est difficile à apprendre.” Cela reflète en fait le défi cognitif, qui peut être bénéfique pour le cerveau, même si ce n’est pas très agréable sur le moment », assure Michael Scullin.
L’hypothèse de la “réserve technologique”
Ces conclusions viennent contredire l’idée de « démence numérique », selon laquelle une exposition prolongée aux technologies affaiblirait nos capacités mentales. Au contraire, les chercheurs suggèrent que l’engagement numérique pourrait renforcer une « réserve technologique », concept selon lequel l’utilisation active des outils numériques stimulerait le cerveau, favorisant ainsi la résilience cognitive.
« Si vous faites cela pendant des années et que vous vous y investissez vraiment, même si cela peut parfois vous frustrer, cela peut être le signe que vous faites travailler votre cerveau », pointe le professeur de Baylor, co-auteur de l’étude.
Des bénéfices au-delà de la stimulation cognitive
Outre la stimulation intellectuelle, l’usage des technologies numériques offre d’autres avantages notables pour les seniors. Elles facilitent notamment le maintien des liens sociaux, un facteur clé dans la prévention du déclin cognitif. Applications de messagerie, appels vidéo, réseaux sociaux : autant de moyens pour rester connecté avec ses proches et rompre l’isolement, souvent préjudiciable à la santé mentale.
Par ailleurs, les dispositifs numériques peuvent servir d’aides précieuses pour compenser certaines pertes de mémoire ou difficultés organisationnelles. Rappels électroniques, GPS, applications de gestion des tâches : ces outils permettent aux personnes âgées de conserver leur autonomie plus longtemps.

Une utilisation active et réfléchie, clé des bénéfices
Il est important de noter que les bénéfices cognitifs associés à l’usage des technologies numériques dépendent de la manière dont elles sont utilisées. Une consommation passive, telle que le visionnage prolongé de la télévision, n’offre pas les mêmes avantages qu’une interaction active et engagée. Apprendre à utiliser une nouvelle application, résoudre un problème technique ou participer à des discussions en ligne sont autant d’activités qui sollicitent et entretiennent les fonctions cognitives.
Encourager les seniors à adopter et à maîtriser les technologies numériques pourrait ainsi devenir une stratégie clé dans la prévention du déclin cognitif. Mais à une condition : dépasser les préjugés pour envisager une utilisation réfléchie et bénéfique des technologies, au service du bien-vieillir.