
À 32 ans, Miley Cyrus livre son neuvième album, Something Beautiful, ce 30 mai. Un projet visuel comme elle n’en avait encore jamais fait.
Dans un paysage pop actuel surchargé, marqué par de nouvelles artistes passionnantes, l’Américaine, qui a fait son arrivée dans nos écouteurs (et sur nos écrans) il y a près de 20 ans, a choisi de se renouveler, deux ans après le succès du tube Flowers, à travers dix chansons, deux interludes et un prélude. Un disque qu’on a peut-être d’abord eu du mal à cerner, pour finalement mieux l’apprécier.
En 2023, Miley Cyrus avait amorcé l’arrivée du printemps avec l’album qui allait nous suivre tout l’été, Endless Summer Vacation. Plus qu’un tube, son morceau phare, Flowers, s’est imposé comme le succès de l’année, et lui a même permis de gagner les premiers Grammy Awards de sa carrière. Comment allait-elle donner suite à ce succès commercial et artistique ? L’Américaine, entendue en 2024 sur Cowboy Carter de Beyoncé (II Most Wanted), n’a pas attendu longtemps pour retrouver les studios et tease depuis des mois ce nouveau projet énigmatique.
Fin mars, plutôt que de partager un premier titre accrocheur d’un album à venir, Miley Cyrus a dévoilé son Prelude. Dans cette introduction, la popstar invite à découvrir son nouvel univers avec une ambiance très cinématographique portée par des cordes dans la seconde partie, de plus en plus grave. C’est d’ailleurs la tenue Thierry Mugler datant de 1997, que l’on voit dans cet extrait, qui a été choisie pour être sur la pochette du disque de Something Beautiful, où la star est photographiée par Glen Luchford.
Plus qu’un album, la trentenaire promettait un album-visuel, devenu la marque de fabrique de Beyoncé dans les années 2010 avec Beyoncé (2013) et le génial Lemonade (2016), avant qu’elle décide d’arrêter les clips. Ainsi, en plus des vidéos déjà dévoilées pour accompagner cette sortie musicale, Miley Cyrus convoque ses fans au cinéma pour une séance unique de son film musical d’une heure. En France, le rendez-vous est donné le 27 juin.
Un album “hypnotisant et glamour” selon Miley Cyrus
Toutes ces informations ont fini par nous faire nous interroger sur son projet. Allait-elle abandonner la pop ? Partir vers des genres pas encore explorés, au-delà du glam rock et de la country qu’elle affectionne tant ? Dans une interview donnée à Harper’s Bazaar, la chanteuse appuyait son parti-pris : « L’aspect visuel est au cœur du son. Il était important pour moi que chaque chanson ait ces propriétés sonores apaisantes. Qu’elles parlent de destruction, de chagrin ou de mort, les chansons sont présentées avec beauté, car les moments les plus difficiles de notre vie ont leur part de beauté. »
Pour créer Something Beautiful, la native du Tennessee a travaillé avec Shawn Everett, producteur déjà aux manettes du précédent, qui a collaboré avec certains des meilleurs groupes de la scène rock indé américaine (The War on Drugs, Kurt Vile, Big Thief, Alvvays) ainsi qu’avec des artistes féminines passionnantes (Kacey Musgraves, Maggie Rogers). Il annonçait d’ailleurs au média américain qu’il s’agissait de l’album « le plus expérimental, mais avec une touche pop » fait par Cyrus à ce jour. De son côté, la principale intéressée a parlé d’un opus « hypnotisant et glamour » avec des thèmes bien lourds comme la destruction, le chagrin et la mort ».
Avec quatre singles dévoilés ces dernières semaines (et un clip à chaque fois), on se demandait ce qu’il nous restait à découvrir et si le meilleur n’avait pas été partagé. Mais l’écoute s’est révélée plus complexe.
Something Beautiful, qui a donné son titre à l’album, est la chanson la plus langoureuse avec ses rythmes soul, faite de paroles courtes et éloquentes : « Chaque fois qu’il pleut / Je pense à toi / Je pense à l’éclat. » L’enchaînement avec End of the World, deuxième single dévoilé au printemps et tube du disque, est vraiment réussi, telle une invitation à la fête qu’elle rêve d’organiser.
Ballade, cordes et ambiance funky
More To Lose, en quatrième piste, est la ballade qu’on attendait. Elle permet à Miley Cyrus de nous rappeler la puissance de sa voix si unique. Un morceau qui ravira celles et ceux qui adorent The Climb (dont nous faisons partie) et plus récemment Used To Be Young. Miley Cyrus marque avec ce titre, très certainement le plus touchant avec ses paroles bien pensées (« Tu ressembles à une star de cinéma avec un manteau usé / Alors je jette ma fierté ») et poignantes (« Je pensais juste que nous avions plus à perdre ») sur la fin d’une relation, portées par des notes de saxophone.
Après le meilleur enchaînement de trois titres de l’album, place au premier interlude, dont la voix de la chanteuse est absente, comme pour nous inviter à respirer profondément avant la suite : le génial et très funky Easy Lover, avec ses lignes de guitare et de basse auxquelles viennent ensuite se mêler les cordes. On s’imagine alors facilement fredonner « You got the love I always needed », qu’elle chante avec sa voix rauque. Tient-on le titre de l’été de l’album ? Peut-être bien.
Après le second interlude, Miley Cyrus dévoile ce qui est peut-être notre dernier coup de cœur de l’album. Démarrant avec des bruits de moto, Golden Burning Sun se lance sur un ton plus dramatique. La chanson d’amour est emportée par la batterie et les guitares plus effacées qui jouent sur un effet de nostalgie. Le changement d’ambiance est total sur Walk of Fame (titre le plus long, de 6 minutes) et son ambiance très 80-90s avec des synthés assumés, qu’elle partage avec Brittany Howard du groupe Alabama Shakes. Si l’artiste tarde à arriver, elle amène finalement un côté plus funky (encore) au titre.
Des références marquées aux années 1980
Mais l’essoufflement arrive sur Pretend You’re God, morceau le plus faible du disque qui reprend malheureusement trop d’éléments déjà entendus plus tôt. Vient ensuite le moment d’entendre le nom qui nous avait le plus étonné en découvrant la tracklist : la mannequin Naomi Campbell fait une apparition sur Every Girl You’ve Ever Loved, où elle répète le titre et le mot « pose » tout au long du morceau aussi dansant qu’original.
Concernant Reborn, l’avant-dernier morceau, bien que son nom ait une véritable signification pour l’artiste (son album est bien une réinvention, aussi artistique que personnelle), on se demande un peu pourquoi il arrive si tard. Dommage, d’autant plus que son rythme hypnotique reprend un peu trop le titre précédent et tombe finalement à plat.
C’est avec des notes plus émotives que la pop star nous quitte sur Give Me Love, clôturant la deuxième partie plus monocorde et très taillée pour le dancefloor de Something Beautiful, où elle scande le refrain sur des arrangements orchestraux très rêveurs, et s’adresse très probablement à son petit ami actuel, le batteur américain Maxx Morando.
Comme pour le précédent, ce nouvel album ne devrait pas l’embarquer en tournée. Si elle évoquait il y a deux ans la manque de connexion avec le public dans les grandes tournées, elle partage désormais une raison médicale. Invitée du podcast de Zane Lowe le 21 mai dernier, elle révélait souffrir d’un œdème de Reinke, provoquant le gonflement des cordes vocales, et rendant les prestations live d’autant plus compliquées.
Au fil des années, Miley Cyrus nous a prouvé qu’elle était l’une des artistes les plus versatiles de sa génération (qu’on l’aime ou non). Elle n’a peut-être pas réussi à mettre tout le psychédélisme qu’elle annonçait dans Something Beautiful, mais parvient à nous emmener dans un voyage différent des précédents. Les singles ne sont pas évidents, mais les arrangements, et surtout les cordes qui ponctuent tout l’album, marqué par des références assumées aux années 1980, sont un hommage sérieux à toute la musique qu’elle aime.
Finalement, si l’expérimental n’est pas au rendez-vous, on se réjouit de cet élan différent pris par Miley Cyrus, qui, à 32 ans et après 20 années passées sous les projecteurs, s’amuse toujours, c’est indéniable.