
Avec 13 jours 13 nuits, Martin Bourboulon revient au film contemporain en adaptant le récit du Commandant Mohamed Bida pendant la prise de Kaboul en 2021. Plus qu’un long-métrage de guerre, le réalisateur signe ici un film sur les héros modernes. Critique.
Il y a quatre ans, les Américains annoncent vouloir se retirer d’Afghanistan. Une décision qui favorise la prise de pouvoir par les talibans. Au milieu du chaos, plusieurs ressortissants français, ainsi que des centaines d’Afghans, tentent de se réfugier dans le seul endroit encore protégé : l’Ambassade de France à Kaboul. En son sein, le commandant Mohamed Bida, bien déterminé à évacuer le plus de civils possibles, doit négocier avec les talibans dans l’espoir d’organiser un convoi jusqu’à l’aéroport de la capitale. Une véritable course contre la montre va alors s’engager afin de quitter l’enfer de Kaboul.
Après Les trois mousquetaires (2023) Martin Bourboulon est de retour au cinéma avec 13 jours, 13 nuits. Récit nerveux inspiré du roman éponyme écrit par le Commandant Mohamed Bida, le long-métrage revient sur la prise de Kaboul de 2021 par les talibans. Ainsi, après la bataille de La Rochelle, c’est sur le front afghan que Martin Bourboulon a choisi de poser sa caméra afin de raconter un récit contemporain porté par le talentueux Roschdy Zem.

Un véritable film de guerre ?
L’acteur prête ici ses traits au militaire en charge de l’évacuation ; un chef d’orchestre pris en étau entre sa direction, qui a reçu l’ordre d’évacuer les lieux, et sa volonté de ne laisser personne derrière lui. Avec ce héros, Martin Bourboulon construit ainsi toute une réflexion sur le droit et la morale, dans un film de guerre inédit.
Mais peut-on vraiment qualifier 13 jours 13 nuits de film de guerre ? Difficile à dire, car, sans jamais montrer le conflit grondant aux portes de la ville, Martin Bourboulon nous plonge malgré nous dans « l’enfer de Kaboul ». Huis clos dans l’Ambassade assiégée, échanges musclés, convoi haletant… Le réalisateur filme l’angoisse de ses personnages sans jamais nous montrer les véritables affres de la guerre. Un choix judicieux qui rend la tension et les enjeux qui se jouent à l’extérieur de l’ambassade d’autant plus palpables.

Dans cette optique, le long-métrage offre de belles scènes de tension. On pense notamment à la séquence du convoi ; un moment décisif pour la narration qui rappelle la scène désormais culte de l’embuscade à la frontière de Sicario (2015). Toutefois, n’est pas Denis Villeneuve qui veut : malgré la nervosité de son récit, Martin Bourboulon semble vouloir trop coller à l’œuvre source, sans jamais prendre de risques visuels.
Le héros avant tout
Il en ressort un film de guerre convaincant de par sa démonstration, mais qui manque d’envergure en termes d’action. En vérité, Martin Bourboulon semble surtout vouloir interroger la figure du héros moderne grâce au personnage de Roschdy Zem, impeccable dans le rôle du Commandant que l’on surnomme Mo. Un projet intéressant dans la trajectoire du cinéaste qui, il y a quelques années, se frottait au plus classique des héros de la littérature, d’Artagnan.
Ce n’est pas non plus anodin si, pour incarner son personnage principal, Martin Bourboulon a choisi Roschdy Zem ; un symbole d’autorité aussi sensible que charismatique qui parvient à chaque interprétation à insuffler une véritable énergie à ses personnages. Autour de lui gravitent plusieurs protagonistes, des héroïnes des temps modernes à qui Lyna Khoudri et Sidse Babett Knudsen prêtent leurs traits.
La première incarne une humanitaire franco-afghane, tandis que la seconde interprète une reporter de guerre bien décidée à rendre compte de la prise de Kaboul. Des personnages féminins forts dont la présence élargit la galerie présentée par Martin Bourboulon et qui permet surtout d’étendre le récit aux femmes et à leur histoire.
En racontant l’histoire de Mohamed Bida, Martin Bourboulon propose une adaptation qui résonne avec l’actualité et les chamboulements que connaissent actuellement le Proche et le Moyen-Orient. Mais, au-delà du long-métrage nerveux qui permet, par ailleurs, au réalisateur de Papa ou Maman (2015) de s’affirmer en tant qu’artiste, 13 jours 13 nuits offre avant tout une œuvre de personnages. En interrogeant la mythologie du film de guerre, Martin Bourboulon questionne la figure du héros moderne, sauf qu’ici la cape et l’épée du mousquetaire ont laissé place au gilet pare-balles du militaire.
13 jours 13 nuits, de Martin Bourboulon, avec Roschdy Zem, Lyna Khoudri et Sidse Babett Knudsen, 1h52, le 27 juin au cinéma